Un lamantin des Caraïbes, espèce protégée disparue localement, est réapparu au Moule le 4 juillet dernier. Femelle balisée à Porto Rico, sa santé est surveillée : respect et prudence s’imposent.
Un phénomène rare en Guadeloupe
Un phénomène rare s’est produit jeudi 3 juillet 2025 au Moule, en Guadeloupe : l’observation d’un lamantin des Caraïbes, Trichechus manatus, espèce considérée comme éteinte dans nos eaux. Il s’agit d’une femelle mature, équipée d’une balise à Porto Rico en janvier 2025. Son état de santé était en cours d’évaluation le 4 juillet dernier par une équipe spécialisée.
Selon le Parc national de la Guadeloupe, l’individu identifié comme « Taicaraya » a parcouru plus de 500 km depuis sa libération en février 2025 à l’embouchure de la rivière Espiritu Santo, à Porto. Sa présence dans l’archipel est qualifiée d’« exceptionnelle », l’espèce ayant disparu au début du XXᵉ siècle.
Un espoir pour la biodiversité : un retour inattendu
Autrefois classique des estuaires et mangroves guadeloupéens, le lamantin des Antilles s’était totalement éteint localement suite à la chasse et la destruction de son habitat. Son retour, même isolé, offre un symbole de résilience écologique.
Le programme LIFE SIRENIA, mené de 2008 à 2018 par le Parc national, visait justement à évaluer la possibilité de réintroduction de l’espèce dans le Grand Cul-de-Sac Marin.
Le lamantin des Antilles est un mammifère marin protégé, classé « en danger » par l’UICN, qui fréquente les eaux littorales peu profondes, saumâtres ou douces. Herbivore sous-marin, il se nourrit de plantes aquatiques, possiblement d’algues ou de feuilles de palétuviers.
Une vigilance citoyenne indispensable
Les autorités locales et nationales ont rappelé la réglementation stricte qui protège cet animal :
Il est interdit d’approcher les mammifères marins à moins de 300 m, que ce soit par mer, terre ou air, en vertu de l’arrêté national du 1er juillet 2011 et l’arrêté préfectoral n° R022024071200001.
Le préfet insiste : « Nous en appelons au civisme de chacun afin de ne pas perturber l’animal et respecter la législation en vigueur ».
Une approche non conforme pourrait altérer son comportement, gêner son alimentation, son repos, ses déplacements, voire entraîner des blessures. Les mesures mises en place avec la commune incluent des dispositifs terrestres visant à limiter le dérangement.
Le défi de la conservation : entre espoir et prudence
Si la présence de ce lamantin au Moule est un signe encourageant, elle reste isolée ; il est trop tôt pour prédire un retour durable de l’espèce en Guadeloupe. Ce déplacement s’inscrit néanmoins dans un phénomène naturel de « bioprospection géographique », où les individus explorent de nouveaux territoires.
Le suivi scientifique engagé – balise, surveillance sanitaire, protections légales – permet de tirer des enseignements précieux pour de futurs projets de réintroduction. Toutefois, ce succès potentiel s’accompagne d’une mission de sensibilisation : le respect de la distance.